Jensen Huang, le patron de Nvidia, joue la carte (graphique) de l'Intelligence artificielle
JUN 09, 2023
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Nvidia a le vent en poupe. Le géant américain des processeurs graphiques est entré brièvement, fin mai, dans le club très select des entreprises pesant 1000 milliards de dollars à Wall Street et ce grâce au boom de l'intelligence artificielle. Portrait de son PDG, Jensen Huang.

Dans son histoire, qu’il ne juge pas particulièrement extraordinaire, on retrouve les codes de l'American Dream et du mythe du self-made man. Né à Taïwan, Jen-Hsun Huang, de son nom de naissance, est envoyé par ses parents aux États-Unis alors qu'il n'a pas 10 ans. Point de chute : une pension dans le Kentucky, où raconte-t-il, il était de corvée de nettoyage des sanitaires.

Adolescent, c'est d'abord dans les compétitions de ping-pong qu'il brille, avant de décrocher un diplôme en génie électrique en 1984, à l'heure où naissait le Macintosh.

Il ne va pas travailler chez Apple mais rejoint la Silicon Valley. Après quelques années passées notamment chez un futur concurrent et avoir décroché un nouveau diplôme, à Stanford cette fois, il co-fonde Nvidia en 1993. Exit le mythe de la start-up créée dans un garage, la légende veut que Jensen Huang et deux amis aient posé les bases de leur entreprise au Denny's, un restaurant, de San José. Elle deviendra Nvidia - l'envie en latin.

À en croire Jensen Huang, Nvidia, c'est presque de la magie. « Grâce à ce que l'on fait, on rend possible, ce qui est à difficilement réalisable, on rend économe en énergie, ce qui est très énergivore, et nous pouvons modifier quelque chose de très cher pour le rendre bien plus abordable », vante-t-il sur CNBC.

« Visionnaire »

Concrètement, Nvidia conçoit des composants informatiques très spécifiques. « Il a créé Nvidia à l'ombre des géants des processeurs tels qu'Intel avec une stratégie assez particulière au fil des années, en se concentrant sur les processeurs graphiques, en particulier pour les jeux vidéo. C'était d'abord une sorte de niche mais qui demandait une excellence technique », explique Rémi Bourgeot, économiste et statisticien, chercheur associé à l'Iris.

Premier grand succès en 1999 avec le premier processeur graphique (GPU) au monde. Jensen Huang, qualifié de « visionnaire » par Mohamed Makhlouf, enseignant en intelligence artificielle à l'Essca, a ensuite flairé de nouveaux marchés pour ces cartes à haute capacité de calcul, le minage de cryptomonnaie et surtout l'IA.

« Ils ont conçu des puces spécialement pour l'intelligence artificielle à partir de 2016-2017, pour des calculs de 'deep learning', pour les voitures autonomes. ChatGPT fonctionne aussi sur des puces de Nvidia ».

Des puces que Nvidia conçoit, mais ne fabrique pas. « Grâce à son amitié avec Morris Chang, le président de TSMC, il a mis en place une approche de fabrication 'fabless' (NDLR : sans usine en français), rappelle Mohamed Makhlouf. Elle a été vraiment l'un des piliers de la croissance rapide de Nvidia. »

L’action Nvidia prise d’assaut

Avec l'essor de l'intelligence artificielle, son produit vedette le H100, valant plusieurs milliers de dollars pièce, fait fureur. « Les GPUs sont nettement plus difficiles à trouver que de la drogue », a même ironisé Elon Musk lors d'un événement organisé par le Wall Street journal. Nvidia fait course largement en tête. Selon le cabinet Jon Peddie Research, Nvidia pesait 82% des GPU autonomes livrés dans le monde fin 2022, ses deux poursuivants s'octroyant 9% chacun. Résultat, la valeur de l’entreprise californienne a bondi en bourse et avec elle la richesse de Jensen Huang, classé, par Forbes, 37ᵉ homme le plus riche du monde avec une fortune de quelque 34 milliards de dollars.

Riche, Jensen Huang est aussi multirécompensé. Il figure notamment sur la liste du Time des 100 personnalités les plus influentes de 2021. Et les derniers mois ont permis à l'homme à la veste de cuir d'asseoir sa notoriété.

« Il avait un statut assez légendaire dans les milieux liés aux jeux vidéo parce que ses processeurs sont devenus indispensables aux jeux vidéo qui nécessitent le plus de puissance de calcul pour les applications graphiques, » souligne Rémi Bourgeot.  « Aujourd'hui, étant au centre de la grande tendance du développement de l'IA, il est vraiment reconnu pour des paris qu'il a faits dans la durée »

Encore quelques « décennies »

Malgré cette renommée, Rémi Bourgeot lui prête une « certaine mesure ». « C'est quelqu'un qui est resté vraiment concentré, il est resté un ingénieur. On ne voit pas quelqu'un avec des visées mégalomaniaques de couverture de tous les marchés technologiques imaginables ».

À 60 ans, Jensen Huang en a déjà passé trente à la tête de Nvidia. Et il a confié à CNBC ne pas être prêt à lâcher les rênes, quitte à se transformer en robot. « Je ne sais pas encore combien de temps, mais dans quarante ans, je serai robotique, et après ça, peut-être trois ou quatre décennies de plus. Donc, j'espère pouvoir en profiter encore très longtemps. »

Fidèle au nom de l'entreprise, le PDG a donc l'envie dans les veines et Nvidia dans la peau. Littéralement. Jensen Huang s'est fait tatouer sur le bras un dessin inspiré du logo de la marque.

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