Hyacinthe Niyitegeka, une «force tranquille» pour le climat
JUN 23, 2023
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Hyacinthe Niyitegeka, négociatrice climat rwandaise de 30 ans, est investie dans la coalition des « pertes et dommages ». Un sujet au menu du sommet pour un nouveau pacte financier entre Nord et Sud qui se tient ces 22 et 23 juin à Paris. Portrait d'une jeune femme déterminée, à la fois scientifique et activiste pour le climat.

Elle n'est pas au sommet mais depuis Kigali, elle scrute la moindre prise de paroles tant les enjeux sont importants. Hyacinthe Niyitegeka est engagée pour l'Afrique, pour le Rwanda où elle nait il y a trente ans dans une zone rurale, dans l'est du pays. C'est au lycée, qu'elle prend conscience des enjeux environnementaux et qu'elle forge ses convictions : « Un jour, il y a eu une conférence qui parlait des ravages de la désertification, se souvient-elle. Je viens d'une région très sèche où la population dépend de l'agriculture. Quand il ne pleut pas, cela veut dire qu'on va souffrir et donc que ma famille va souffrir. À ce moment-là, je suis devenue très inquiète. "Que va-t-il se passer quand nous n'aurons plus d'eau ? Allons-nous partir ailleurs ? Notre pays est si petit". Je me posais beaucoup de questions alors j'ai décidé de m'intéresser davantage à ce problème. »

Engagée pour un fonds « pertes et dommages »

Hyacinthe Niyitegeka étudie la gestion de l'eau à l'université d'Addis-Abeba, puis la sécurité alimentaire aux Pays-Bas. Elle est souvent en déplacement, mais connectée en permanence à son continent puisqu’elle est aujourd'hui en première ligne dans les discussions sur les Pertes et Dommages. Objectif : la création d'un fonds pour soutenir les populations qui subissent les pires impacts du changement climatique. Pour le nourrir, une somme minimale de 400 milliards de dollars par an a été préconisée. Les pays développés y contribueraient et il y aurait aussi d'autres financements émanant de taxes qui restent à créer.

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Les propositions concrètes ne font pas l'unanimité, les décisions tardent. Alors Hyacinthe Niyitegeka négocie : « Dans les négociations, je représente mon pays à 100%. J'attends toujours, et c'est le cas pour ce sommet de Paris, que les participants comprennent mieux la réalité des pertes et dommage. La situation empire, les populations sont de plus en plus affectées et la réponse aux impacts du changement climatique est trop lente, c'est ça la réalité. »

Une conciliatrice hors pair

Des négociations rudes, semées d'embuches, comme ce fût le cas la semaine dernière à Bonn en Allemagne lors des discussions pré-COP28. Elle doit batailler, et faire s'entendre des gouvernements, des ONG, des chercheurs. « Hyacinthe, pour moi, c’est la force tranquille, témoigne Fanny Petitbon, responsable plaidoyer pour l'ONG Care-France, proche de Hyacinthe Niyitegeka. Elle n’a pas un rôle facile mais elle essaye de nous aider à maintenir le cap vers toujours plus d'ambition. Malheureusement, les pays riches font tout pour essayer notamment de diviser les pays du Sud et les pays émergents qui peuvent avoir des intérêts divergents, notamment sur les sujets de financement climat et au contraire, Hyacinthe nous aide à concentrer notre plaidoyer, à être le plus impactant possible. »

Nouvelle réunion à Bangkok

Au sein de la coordination des Pertes et Dommages, Mamadou Sylla est plus qu'un collègue. C'est un ami, ébahi devant la capacité de travail de la négociatrice rwandaise : « Elle est très sérieuse et rigoureuse dans le travail. Diriger un groupe de plus d'une centaine de jeunes qui viennent des quatre coins du monde, qui ont différents tempéraments, avec des qualités mais aussi des défauts. Ça n’est pas donné à tout le monde et elle, elle le réussit très bien. »

Organiser la société civile et la stratégie de la lutte pour les pertes et dommages, c’est un travail long, fastidieux. Elle le poursuivra en juillet à Bangkok lors de la nouvelle réunion sur le financement du fonds ​​​​​« pertes et dommages » pour élaborer des recommandations qui seront examinées et adoptées par la COP28.

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