«C'est impossible de survivre»: en Arménie, les déplacés du Haut-Karabakh manifestent contre le gouvernement
MAR 30, 2024
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En Arménie, six mois après la reprise du Haut-Karabakh par l’armée azerbaïdjanaise, la colère monte parmi les 100 000 déplacés installés en Arménie. Avec le sentiment d’avoir été abandonnés par le gouvernement arménien, ils peinent à trouver du travail et à payer leur loyer. Ces derniers jours, ils manifestent pour un meilleur soutien financier et davantage de reconnaissance de la part du gouvernement. L’arrivée massive de ces réfugiés, qui représentent désormais près de 30% de la population, est un défi de taille. 

De notre envoyée spéciale à Erevan,

En ce jour de manifestation, quatre femmes, d’anciennes voisines, se sont donné rendez-vous au square de la Liberté à Erevan. Un drapeau du Haut-Karabakh à la main, elles sont venues exprimer leurs inquiétudes. Six mois après l’exode, aucune d’elles n’a retrouvé de travail.

Leurs économies fondent et l’espoir de retrouver une vie normale avec elles. « Les loyers sont trop élevés. Pour le moment, on se débrouille, mais avec beaucoup de difficultés. Et puis même si je trouve un emploi, les salaires sont trop bas ici. Pour le même travail, dans le Haut-Karabakh, on aurait été beaucoup mieux payés. Ici, c'est impossible de survivre », raconte l'un d'elles. 

Comme elles, des centaines de déplacés du Haut-Karabakh se sont regroupés pour protester contre la politique du gouvernement arménien. Sevan, un retraité, explique. L’aide mensuelle de 125 dollars qui leur était versée risque d’être remplacée par une aide unique réservée à ceux qui souhaitent acheter une maison. Mais comment faire alors que le prix de l’immobilier explose ? « Le gouvernement avait dit que nous recevrions une aide de 7 600 dollars par personne, mais cela ne règlera pas les problèmes d’un peuple qui a tout perdu. Même pour une famille qui vit en dehors d'Erevan, où c'est moins cher, ce n'est pas assez pour acheter un terrain et construire un logement. Nous avons tout laissé au Haut-Karabakh, nos restaurants, nos hôtels, nos maisons », témoigne-t-il.

« Protéger l'héritage culturel » 

Dans la foule, une minute de silence. Un homme pleure. Il tient une banderole inscrite de ces mots : « Protéger notre culture, protéger notre héritage ». Même demande chez Arak Beglaryan, ancien ministre de la République séparatiste du Haut-Karabakh. « Le gouvernement arménien refuse de parler de notre retour dans le Haut-Karabakh. Il refuse de parler de la protection de notre héritage culturel. Il ne veut pas assumer le fait qu’ils ont échoué à nous protéger. » 

En janvier, le Premier ministre arménien a annoncé vouloir organiser un référendum pour supprimer toute référence au Haut-Karabakh dans la constitution arménienne. Une demande répétée de l’Azerbaïdjan, préalable à tout accord de paix : « Je suis totalement contre cette idée. Le gouvernement arménien est faible et compromet tout sans jamais rien obtenir de l’Azerbaïdjan en échange. Nous n’avons aucune place dans le processus de prise de décision. Le régime dictatorial d’Aliyev en profite et essaie de tout obtenir de l’Arménie ».

À Erevan, chez tous ceux qui ont vécu l’exode, il y a ce mélange de tristesse, de rancœur et d’espoir. Celui d’une paix durable avec l’Azerbaïdjan. Celui, plus timide, d’un retour dans le Haut-Karabakh.   

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