

Début octobre, la Commission européenne a dévoilé une liste de quatre secteurs stratégiques qui devront être mieux défendus face à des puissances rivales. C'est le cas des semi-conducteurs. Les Pays-Bas sont aujourd'hui le seul pays européen à produire ces puces électroniques. Mais une nouvelle usine sera construite à Dresde, en Allemagne, et l’université de la ville formera ses futurs cadres en partenariat avec le géant taïwanais TSMC. L’image est restée dans les mémoires : des chaînes de production à l’arrêt dans l’industrie automobile lors de la pandémie de la Covid. La cause : la rupture des stocks de semi-conducteurs venant de Taïwan via la Chine. Pour l’Union européenne, ce fut un électrochoc, mais un choc salvateur, si l’on en croit Angela Stanzel de la Fondation allemande pour la science et la politique. « », explique-t-elle. La construction d’une usine de semi-conducteurs au cœur de l’Europe vient donc à point nommé. Le géant taïwanais des puces électroniques TSMC, qui contrôle plus de la moitié de la production mondiale, investira près de 4 milliards d’euros dans l’État fédéral allemand de la Saxe, avec à la clé la création de 2000 emplois. Problème : il manque du personnel qualifié. « », précise Josef Goldberger, coordinateur d’un tout nouveau programme d’échange entre l’université technique de Dresde et Taïwan. L'ALLEMAGNE, PRÉCURSEUR MONDIAL DU MARCHÉ DES SEMI-CONDUCTEURS D’où l’idée du projet de l’université technique de Dresde et de l’entreprise TSMC. À moyen terme, une centaine d’étudiants allemands y participeront chaque année. Sur le bureau de Josef Goldberger à Taipei, les candidatures s’accumulent déjà. « », énonce-t-il. De tels partenariats internationaux font d’ailleurs partie de la boîte à outil proposée par l’Union européenne. L’idée étant de mieux armer le continent pour défendre ses intérêts face à la Chine. « », assure Angela Stanzel. Comme l’a expliqué le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, il s’agit de « ». Les étudiants de Dresde doivent devenir les nouvelles têtes de pont de cette stratégie. À lire aussiSemi-conducteurs, IA, biotech... L'UE dévoile ses technologies clés à défendre https://www.rfi.fr/fr/économie/20231003-semi-conducteurs-ia-biotech-l-ue-dévoile-ses-technologies-clés-à-défendre


La guerre entre Israël et le Hamas et ses résonances en Asie du sud-est… L'Indonésie, le plus grand pays musulman de l'Asie du Sud-Est, n'a jamais établi de relations formelles avec l'État hébreu et s'est toujours montrée solidaire de la cause palestinienne. Quelques mois avant l'élection présidentielle prévue en février 2024, les autorités indonésiennes sont de nouveau confrontées à cette question brûlante : faut-il, comme certaines voix le réclamaient encore, il y a quelques mois, engager un rapprochement Israël ?


Les Aborigènes australiens seront-ils enfin reconnus dans la Constitution ? Auront-ils « une voix » au Parlement ? Verdict le 14 octobre prochain à l’issue d’un vote historique. Mais l’amendement à la Constitution, qui devrait réparer en partie des siècles d’injustice, fait l’objet d’un vif débat. Retour sur le long processus de reconnaissance des populations autochtones sur l’île-continent avec l’anthropologue Martin Préaud.


Le Kazakhstan viole-t-il les sanctions occidentales imposées à la Russie depuis la guerre en Ukraine ? Le gouvernement, officiellement neutre dans ce conflit, le dément. Mais comment expliquer que le commerce entre la plus grande économie d’Asie centrale et son alliée historique russe est en plein essor ? Que des lave-linges, des imprimantes ou des drones continuent de passer par la frontière longue de plus de 7 000 kilomètres ? À Almaty, la capitale économique du Kazakhstan, des entrepreneurs en témoignent. Assis dans le jardin d’un hôtel international, Askar tripote un mouchoir dans sa main. Il est nerveux. Trentenaire en t-shirt et baskets, ce patron d’un fonds d’investissement ne s’appelle pas vraiment Askar. Mais ce n’est qu’à condition de rester anonyme que ce jeune entrepreneur est prêt à se confier à RFI :« » Un exemple : depuis la guerre en Ukraine, le Kazakhstan a multiplié par quatre ses importations de lave-linges depuis l’Union européenne. Bruxelles soupçonne la Russie d’en extraire les précieux semi-conducteurs, sous embargo, pour réparer par exemple ses chars. DES LAVE-LINGES POUR LA GUERRE DE POUTINE ? Des lave-linges pour la guerre de Poutine ? « nous explique la responsable d’une entreprise de transport international d’Almaty, qui préfère, elle aussi, rester anonyme. « » La Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) parle d’un véritable : en 2022les exportations vers le Kazakhstan depuis l’Union européenne, les États-Unis et le Royaume-Uni ont augmenté de 80%. Pendant cette même période, celles du Kazakhstan vers la Russie ont augmenté de 22%. Récemment encore, les douanes ont intercepté des drones destinés à la Russie, affirme le politologue Dosym Satpayev : « » « NOUS SOMMES DEVENUS UN PONT ENTRE LA RUSSIE ET LE MONDE OCCIDENTAL » Depuis, un système de traçage a été établi, mais il reste des trous dans la raquette. D’autant que l’élite au pouvoir est connue pour être notoirement corrompue. Comme beaucoup d’autres, le jeune entrepreneur Askar sait en tirer bénéfice : Des hommes d’affaires kazakhstanais aident leurs ex-frères russes à contourner les sanctions, sous les yeux de Bruxelles et de Washington qui n’osent pas sanctionner durement les pays d’Asie centrale, par crainte de les pousser encore plus dans les bras de Moscou.


À la tête du Move Forward, son parti progressiste, Pita Limjaroenrat a raflé le vote populaire aux dernières législatives thaïlandaises et a failli renverser la table en devenant Premier ministre. Il a raté la nomination d'un cheveu face au poids des élites conservatrices. Cependant, son programme infuse déjà la société et pourrait déboucher sur une mini révolution politique d'ici à quelques années. Démilitariser, démonopoliser, décentraliser. En trois mots, il a décapé la campagne des législatives. La jeunesse thaïlandaise a bien sûr voté pour lui. Tous les étudiants qui ont grandi avec la junte militaire et qui n'en peuvent plus d'un système corseté par les généraux ont cru jusqu'au bout en ce député de 42 ans, formé dans les meilleures universités thaïlandaises, intello diplômé d'Harvard et du MIT. Mais Pita a séduit au-delà de son électorat naturel. Son parti, le Move Forward, est allé gratter des voix à Bangkok et dans le nord du pays. Avec 151 sièges sur 500, une coalition progressiste semblait possible et l'ancien monde tout près de disparaître, jusqu'à ce qu'il se réveille. « », affirme Marie-Sybille de Vienne, professeure émérite à l'Inalco et spécialiste de la Thaïlande. « », ajoute-t-elle. Par deux fois, Pita se heurte au mur du réel. Il a besoin des sénateurs pour devenir Premier ministre, mais ces derniers, aux ordres de l'armée, ne le laisseront jamais passer. Deux votes, deux échecs, et pas le temps de respirer. La Cour constitutionnelle thaïlandaise l'accuse très opportunément d'avoir violé la loi électorale et ordonne la suspension de son mandat de député. Il ne sera pas chef du gouvernement. En tout cas, pas cette fois-ci. PITA L'ÉTOILE FILANTE A-T-IL FAIT TOUT CELA POUR RIEN ? « », explique Marie-Sybille de Vienne. On verra d'ici à la fin de la mandature si le progressisme à la Pita a de l'avenir, lui n'a que 42 ans et reste très populaire. Il n'a pas dit son dernier mot. À lire aussiThaïlande : la candidature de Pita Limjaroenrat au poste de Premier ministre déclarée illégale par les parlementaires https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230719-thaïlande-la-candidature-de-pita-limjaroenrat-au-poste-de-1er-ministre-déclarée-illégale-par-les-parlementaires


Direction Okinawa, réputée pour sa gastronomie, ses centenaires et ses plages de sable blanc. Située entre l’océan Pacifique et la mer de Chine, l'île la plus méridionale du Japon abrite encore 32 bases militaires américaines plus de 50 ans après la rétrocession au Japon. Pour comprendre la colère des Okinawais et le rôle géostratégique de l’archipel, Emilie Guyonnet, autrice de (Éditions Géorama), répond aux questions de RFI. RFI : VOTRE LIVRE EST UNE MINE D’INFORMATIONS, EN PARTICULIER SUR L’HISTOIRE RÉCENTE ET TOURMENTÉE DE L’ÎLE. LE DESTIN D’OKINAWA, ANCIEN ROYAUME RYUKYU, BASCULE DE MANIÈRE IRRÉVOCABLE EN 1945. QUE S’EST-IL PASSÉ ? EMILIE GUYONNET : En 1945, Okinawa est le site d’une terrible bataille entre les Américains et les Japonais. C'est la bataille d’Okinawa. Les combats durent trois mois d’avril à juin 1945. Les soldats japonais se battent avec beaucoup d’acharnement, plus que d’habitude, parce que c’est la première bataille sur le sol japonais. Les Japonais finissent par perdre. La bataille fait 240 000 morts, parmi lesquels 123 000 civils, et elle marque le début de la construction des bases américaines à Okinawa. En effet, les Américains avaient prévu un débarquement sur les îles principales du Japon pour novembre 1945 et Okinawa devait servir de tête de pont à ce débarquement. Finalement, au vu de la résistance acharnée des Japonais, les Américains choisissent d’utiliser la bombe atomique et les civils de l’île, qui n’avaient pas pu être évacués à temps, se sont retrouvés pris sous les bombes et c’est ce qui explique le nombre très élevé de victimes civiles. AUTRE DATE CLÉ, 1972, LORSQUE OKINAWA RETROUVE ENFIN SON INDÉPENDANCE DE L’OCCUPANT AMÉRICAIN, ET CE, DEUX DÉCENNIES APRÈS LE RESTE DU JAPON. UN ÉVÉNEMENT QUI N’AURA POURTANT QUE PEU D’INCIDENCE SUR LA PRÉSENCE DES BASES AMÉRICAINES. POURQUOI ? Les habitants de l’île ont l’habitude de dire qu’elle a été sacrifiée trois fois. Une première fois en 1945 avec la bataille d’Okinawa, une deuxième fois en 1951 lors de la signature du traité de San Francisco qui met fin à l’occupation américaine du Japon, mais qui prolonge celle d’Okinawa sans limite dans le temps, et une troisième fois en 1972. En effet, en 1972, les locaux tiennent la rétrocession de l’île au Japon et ils s’attendent au minimum à une réduction des bases américaines, mais en fait, il n’en est rien. La rétrocession a pour conséquence la fermeture de nombreuses bases américaines sur les îles principales du Japon qui sont redéployées partiellement à Okinawa. Donc la présence américaine à Okinawa augmente après 1972. Du fait de cette volonté de concentrer les bases à Okinawa, les locaux se sentent discriminés par rapport au reste du territoire japonais. C’est difficile de savoir s’ils ont raison parce que les dirigeants japonais ne diront bien sûr jamais la vérité sur cette question. Il semble toutefois que ces bases soient surtout concentrées à Okinawa pour des raisons stratégiques. D’après les experts, Okinawa est mieux placée, parce qu’elle est plus centrale par rapport aux pays asiatiques et aux différentes zones de tension. L’autre explication, c’est la nécessité de regrouper les forces sur un seul site pour des raisons d’organisation, de coordination ou pour des raisons stratégiques. DANS VOTRE OUVRAGE, VOUS DONNEZ LA PAROLE AUX OKINAWAIS. QUELS SONT LES TÉMOIGNAGES QUI VOUS ONT LE PLUS MARQUÉ ? C’est le témoignage du deuxième chapitre, celui de Monsieur Uehara qui a perdu presque toute sa famille pendant la bataille d’Okinawa. Ce Monsieur est un véritable exemple de résilience. Il raconte tout cela avec beaucoup de patience et de calme, il est très apaisé. Il explique notamment qu’il n’a pas pu faire d’études, alors qu’il aurait aimé devenir professeur. Il a fondé une famille et a attendu que ses trois enfants terminent leurs études pour reprendre les siennes à l’âge de 48 ans. L’autre témoignage qui constitue le chapitre cinq, c’est celui de Madame Takazato, une militante féministe et travailleuse sociale qui raconte l’état de santé très grave dans lequel se trouvaient les prostituées en 1972, lors de la rétrocession d’Okinawa au Japon, puisqu’en effet, il y avait beaucoup de prostitution aux abords des bases américaines. En 1972, la loi japonaise de prévention de la prostitution est entrée en vigueur à Okinawa, donc les maisons closes ont fermé et Mme Takazato raconte que de nombreuses prostituées ont dû être hospitalisées, car elles étaient très malades physiquement et psychologiquement. Ces deux témoignages m’ont le plus marqué. DANS QUEL ÉTAT D’ESPRIT EST LA POPULATION AUJOURD’HUI, DANS UN CONTEXTE GÉOPOLITIQUE TENDU, NOTAMMENT EN RAISON DES RIVALITÉS SINO-AMÉRICAINES ? Les Okinawais et les Japonais sont conscients que le Japon a besoin des États-Unis, face à la Chine surtout, mais aussi face à la Corée du Nord. L’opinion publique japonaise a une perception très négative de la Chine et a conscience des risques qui pèsent sur l’archipel. La guerre en Ukraine n’a fait que renforcer cette perception. Ils dressent le parallèle avec la situation en Europe et en Asie, avec les visées chinoises à Taïwan, et les Okinawais spécifiquement ont conscience pour la plupart que le Japon a besoin des États-Unis et ne souhaitent donc pas forcément que les bases américaines quittent Okinawa ou le Japon. À lire aussiJapon: Okinawa, cinquante ans après sa restitution par les Etats-Unis, reste une base avancée stratégique https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20220515-japon-okinawa-cinquante-ans-après-sa-restitution-par-les-etats-unis-reste-une-base-avancée-stratégique Ce qu’ils souhaitent, c'est une meilleure répartition des bases sur le territoire japonais, que certaines bases à Okinawa soient transférées ailleurs au Japon, ou qu’elles quittent complètement Okinawa. C'est leur rêve, mais cela paraît difficile. Malheureusement personne ne veut des bases et le commandement militaire américain préfère qu’elles soient regroupées à Okinawa pour éviter des pertes de temps et avoir une meilleure coordination des moyens. CES BASES PROVOQUENT AUSSI UN REJET DE LA POPULATION EN RAISON DE LEUR IMPACT NÉFASTE SUR L’ENVIRONNEMENT. Effectivement, il y a eu beaucoup de problèmes environnementaux, notamment pendant la guerre du Vietnam avec le stockage à Okinawa de barils d’agent Orange, qui ont été retrouvés plus tard et qui ont contaminé les sols et l’eau. Les dernières manifestations à Okinawa sont axées aussi sur la défense de l’environnement, puisqu’une base qui est située au centre d’une grande ville de près de 100 000 habitants va être transférée ailleurs dans l’île, dans le nord, qui est une région très sauvage. Donc deux nouvelles bases vont être construites sur la mer, ce qui pose des problèmes, car les derniers récifs de corail se trouvent dans cette baie. Et il y a des dugongs qui sont de grands mammifères marins en voie d’extinction qui viennent se nourrir dans cette baie et sur ces coraux, donc cela pose des problèmes. Mais les Américains et les Japonais n’en ont pas tenu compte puisque les travaux de construction de la base ont commencé malgré les très nombreuses oppositions. L’autre site de construction d’une nouvelle base, Takae, qui se situe dans la montagne, abrite une forêt primaire où l’on trouve énormément d’espèces, notamment d’oiseaux rares. Donc là aussi, on se dit, c'est affreux, ne peuvent-ils pas trouver un autre site pour leurs bases ? COMMENT VOYEZ-VOUS LES ANNÉES À VENIR, LA POPULATION A-T-ELLE LES MOYENS D’ÉCHAPPER À UN NOUVEAU CONFLIT ? La stratégie américaine évolue globalement vers un maintien d’un nombre réduit de grandes bases, dont Okinawa fera vraisemblablement partie. Et en complément de ces grandes bases, les Américains veulent pouvoir compter sur de nombreuses bases plus petites, disséminées un peu partout dans le monde, avec l’objectif de pouvoir intervenir plus rapidement. C’est lié à la nature des nouvelles menaces, par exemple le terrorisme, et non plus seulement des menaces d’un État à un autre. La concentration des bases à Okinawa, leur proximité avec les points chauds en Asie, c’est aussi un inconvénient parce que cela en fait une cible potentielle à portée des tirs de missiles. C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles les habitants voudraient transférer les bases ailleurs au Japon. Mais ce n’est pas la direction que prennent les gouvernements américains et japonais. À lire aussiLes habitants d'Okinawa votent contre le déplacement d'une base américaine https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20190224-japon-resultat-referendum-okinawa-base-militaire-usa-etats-unis-futenma Une autre évolution, c’est la tendance du Japon à aller vers plus d’autonomie en matière de défense, à la fois parce que les Américains le leur demande et parce qu’au sein du Parti Libéral-Démocrate (PLD), le parti au pouvoir, c’est ce que souhaitent les hommes politiques japonais. Certaines bases américaines pourraient donc être remplacées par des bases japonaises, c’est aussi une possibilité. En tout cas, les risques de conflits en Asie existent vraiment, même si ce n’est dans l’intérêt d’aucune des parties. Ce qui est sûr, c'est que s’il y a un conflit, la population d’Okinawa sera aux avant-postes, comme elle l’a été pendant la Seconde Guerre Mondiale. Cela sera certainement très différent, mais il y a un vrai risque pour la population.


Ce n’est pas un phénomène nouveau, mais le ton monte entre les Philippines et la Chine. Des tensions renouvelées ces dernières semaines autour du navire que les autorités philippines ont fait échouer il y a deux décennies sur un atoll disputé en mer de Chine méridionale. La Chine se montre de plus en plus présente dans l’espace maritime, entrant en conflit avec plusieurs nations dans la région. Jusqu’où cela pourrait-il aller ? La Chine, le Vietnam, les Philippines, la Malaisie, Brunei et Taïwan revendiquent des parties de la mer de Chine méridionale, où transitent chaque année, selon les estimations, 3,37 milliards de dollars, soit 21 % du commerce mondial. La Chine se montre de plus en plus revendicatrice dans la région : « », souligne Mats Engman, ancien haut gradé de la marine suédoise, expert à l'institut du développement et la sécurité. * > C'est aussi une voie maritime très importante qui traverse cette région. Si vous étendez votre contrôle à cette partie de l'océan, vous pouvez également contrôler des lignes de communication vitales pour la paix et la sécurité et pour le commerce international. Mats Engman poursuit en expliquant qu’il y a aussi la volonté d'isoler davantage Taïwan en essayant de réduire le nombre de pays qui entretiennent actuellement des relations diplomatiques avec cet archipel, tenter de persuader certains pays de changer leur reconnaissance diplomatique de Taipei : « . » À lire aussiMer de Chine méridionale: tirs de canon à eau chinois sur des navires philippins https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230806-mer-de-chine-méridionale-tirs-de-canon-à-eau-chinois-sur-des-navires-philippins VERS UNE POSSIBLE FRAGMENTATION DE L'ASEAN ? Pour lui, l’un des risques que cette conquête de l’espace maritime fait courir, c’est une possible fragmentation de l’Asean, car d’un côté se trouve un groupe de nations qui sont politiquement et économiquement dépendantes de la Chine, et de l’autre, un autre groupe de nations qui, de la même manière, sont tournées vers l'Occident et les États-Unis. L'Asean dans son ensemble s'efforce vraiment de s'affirmer en tant qu'organisation indépendante dans le contexte actuel de tensions entre les États-Unis et la Chine. Il s’agit, selon l’expert, d’y trouver son équilibre. Pékin cherche indéniablement à étendre son influence mondiale, mais il s’agit également de réaffirmer son pouvoir au sein de la Chine continentale. L'analyse de Gregory Poling, chercheur au Centre d'études stratégiques et internationales : * > Pékin s'est laissée séduire par son propre conte de fées, pensant que ces eaux, l'espace aérien et les fonds marins ont toujours été chinois et qu'ils ont été volés à la Chine par ses voisins d'Asie du Sud-Est au cours de la période que la Chine qualifie de "siècle d'humiliation". « », souligne encore le chercheur. À lire aussiAsie du Sud-Est: au sommet de l'Asean, la mer de Chine méridionale et la Birmanie polarisent https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230905-asie-du-sud-est-au-sommet-de-l-asean-la-mer-de-chine-méridionale-et-la-birmanie-polarisent INTIMIDATION CHINOISE Gregory Poling rappelle que beaucoup de gens en Asie du Sud aiment se remémorer une anecdote révélatrice de l’attitude de la Chine. « Certains pays sont de grands pays, d'autres sont petits. Ce qui sous-entend que la Chine a un ensemble de règles et que tous les autres en ont un autre. » Selon l’expert, cela en dit long sur la façon dont la Chine voit l'avenir de la région, que ces pays vont vivre dans l'orbite de la Chine et qu'ils feraient mieux de s'y habituer. « » * > La loi est une chose avec laquelle on gouverne. Ce n'est pas une chose par laquelle on est gouvernés. La loi ne s'applique pas aux puissants. Elle ne s'applique qu'aux faibles. Greg Poling estime que la Chine ne cherche en aucun cas le conflit armé, mais que Pékin veut cependant utiliser tous les outils de coercition et d'intimidation dont elle dispose, à l'exception de la force militaire, pour convaincre ses voisins d’aller dans telle ou telle direction. À lire aussiPhilippines: Manille condamne les actions «illégales» de Pékin en mer de Chine méridionale https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230908-philippines-manille-condamne-les-actions-illégales-de-pékin-en-mer-de-chine-méridionale


La température de l’air a augmenté de plus d’un degré depuis le début du XXe siècle, ce qui provoque une fonte des glaciers dont les conséquences pourraient être dantesques d’ici la fin du siècle. Échange avec Patrick Wagnon, glaciologue à l'Institut des géosciences de l'environnement de Grenoble. Les deux tiers des glaciers de l'Himalaya et de l'Hindou Kouch pourraient fondre d'ici 2100 si la planète restait sur la même trajectoire d'émissions de gaz à effet de serre, avec des conséquences dramatiques pour les millions d’habitants qui dépendent des ressources en eau jusqu’ici fiables. Près de 60 millions de personnes vivant autour de l'Himalaya souffriront de pénuries alimentaires dans les décennies à venir, alors que les glaciers rétrécissent et que les sources d'eau dont ils dépendent pour arroser leurs cultures se tarissent. À lire aussiLes glaciers de l'Himalaya fondent à une vitesse inattendue selon une étude https://www.rfi.fr/fr/environnement/20230620-les-glaciers-de-l-himalaya-fondent-à-une-vitesse-inattendue-selon-une-étude


Comment vit-on sous une surveillance permanente, sans le droit de s’exprimer librement et avec la peur d’être dénoncé à tout moment ? Zhang Zhulin en témoigne. Dans son livre , ce journaliste français d’origine chinoise dénonce une mainmise autoritaire qui ne s’arrête pas aux frontières chinoises et dont est aussi victime la diaspora des Chinois de France. ()


Élévation du niveau de la mer, réchauffement de l’océan, acidification de l’océan, inondations, sécheresses, catastrophes naturelles à répétition… Les nations du Pacifique sont en danger de disparition totale. Milika Sobey, scientifique marine, est directrice de programme pour les îles du Pacifique au sein de l'Asia Foundation. Elle a décidé de contribuer à sa manière à l’éducation des plus jeunes aux Fidji. Elle est à l’initiative de la publication de dix livres pour enfants qui visent à les éclairer sur les grands thèmes du réchauffement climatique. RFI : QUELS SONT LES THÈMES DES 10 LIVRES QUE VOUS AVEZ PUBLIÉS ? MILIKA SOBEY : Nous avons commencé avec qui parle de l'élévation du niveau de la mer, un sujet très actuel. Les gens du Pacifique savent très bien ce qu’implique la montée des eaux. Quelqu'un d’autre a décidé d'écrire sur les mangroves, parce que c’est souvent un écosystème sous-estimé, mais qui joue un rôle critique dans l'atténuation du changement climatique. On a écrit sur l'acidification des océans, un autre sujet d'actualité, car l'absorption par l'océan d'une plus grande quantité de dioxyde de carbone entraîne l'acidification des océans, qui entraîne à son tour un manque de calcium dans certaines structures marines. C'est aussi crucial. Un autre a décidé d'écrire sur les forêts, parce que les forêts sont tout aussi importantes et connectées à l'océan. À écouter aussiGrand Reportage - Fidji, des îles du Pacifique en première ligne https://www.rfi.fr/fr/podcasts/grand-reportage/20221109-fidji-des-îles-du-pacifique-en-première-ligne POURQUOI EST-CE IMPORTANT DE PARLER DÈS LE PLUS JEUNE ÂGE DU RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE ? Parce que nous vivons dans une région où nous contribuons le moins aux émissions de carbone, mais où nous sommes probablement confrontés aux impacts les plus importants du changement climatique. Les enfants du Pacifique sont confrontés à des cyclones violents. Nous en avons eu plusieurs au cours des six dernières années. Des cyclones de catégorie 5. Ces événements très intenses sont tellement ravageurs pour les communautés dans tout le pays, pas seulement ceux de la côte… à l'intérieur des terres aussi. Donc, il est nécessaire que les enfants soient informés. Comment tout cela est-il lié au changement climatique ? Nous allons voir davantage de ces phénomènes météorologiques violents. Nous avons de graves inondations entre les cyclones. Ce n'est pas seulement les îles, c'est le monde entier. À lire aussiFidji : un retour aux savoirs ancestraux pour préserver l’environnement https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20221115-fidji-un-retour-aux-savoirs-ancestraux-pour-préserver-l-environnement LE MONDE ENTIER SUBIT LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE, MAIS LES PAYS INSULAIRES DEMEURENT EN PREMIÈRE LIGNE ? Les gens qui vivent sur le continent européen supposent que tous les enfants qui vivent dans les îles connaissent les récifs par exemple, mais pas nécessairement. Les enfants qui vivent en ville ne vont pas vraiment sur le récif, c’est donc important de leur expliquer. Ils doivent connaître l'importance des mangroves. Ils doivent savoir comment le changement climatique a des conséquences sur les systèmes naturels qui les protègent. C'est pourquoi il est important que les enfants des îles du Pacifique soient informés sur ces sujets. Je pense qu'il suffit de se rendre dans nos communautés côtières pour se rendre compte de l’urgence de la situation. Il n’y a pas un jour qui passe sans que l’on lise dans les journaux que telle communauté sur la côte vient d’avoir une intrusion d'eau salée dans son village. Et, en gros, on parle tout le temps de la perte de terres au détriment de la mer. ET PAR AILLEURS, LES PERSONNAGES DES LIVRES SONT FIDJIENS ET ILS ONT TOUS ÉTÉ ÉCRITS ET ILLUSTRÉS PAR DES LOCAUX… Les enfants peuvent s'y identifier parce que les personnages ont des noms qu'ils peuvent reconnaître. Ils leur ressemblent. Ils ont des décors et des thèmes qui leur sont familiers. C'est ce qui fait la particularité de ces livres et c'est pourquoi nous avons demandé à des créatifs locaux de les produire. Vous savez, j’ai grandi en lisant des histoires de Raiponce, de Blanche Neige et de la Belle au bois dormant et en lisant des histoires de neige et d'ours. Nous ne savons pas ce qu'ils sont parce que nous vivons sous les tropiques ! C'est tellement rafraîchissant que les enfants puissent maintenant lire des livres auxquels ils peuvent s'identifier. Ils peuvent s'y reconnaître, et l'un des objectifs de ces livres est de susciter l'amour de la lecture chez les enfants. Donc si vous pouvez les faire commencer à aimer la lecture dès leur plus jeune âge, c'est un amour qu'ils auront pour le reste de leur vie. À écouter aussiTémoins d'Actu - Climat : comment les populations des îles du Pacifique luttent pour leur survie https://www.rfi.fr/fr/podcasts/témoins-d-actu/20221115-climat-comment-les-populations-des-îles-du-pacifique-luttent-pour-leur-survie


Le sanskrit, c'est la langue des érudits indiens, celle des textes religieux. Elle est de moins en moins parlée, mais sa grammaire continue de fasciner. Elle repose sur l'ouvrage d'un savant génial nommé Panini, qui a mis au point dans l'Antiquité des règles qui intriguent encore la communauté scientifique. Mais un étudiant de Cambridge pourrait avoir levé une partie de son mystère. La grammaire de Panini, c'est la naissance de la linguistique moderne. Un chef-d'œuvre de précision et de sophistication qui n'a jamais été égalé... Comment fonctionne-t-elle ? À la manière d'un architecte, Panini invente ce que l'on appelle une métalangue : près de 4 000 règles, les sutras, qui organisent le bon usage du sanskrit. Cette construction intellectuelle, vieille de plusieurs siècles avant Jésus-Christ, est si fine qu'elle fascine encore les grammairiens modernes. « expliquele philologue et traducteur Michel Angot, spécialiste de la littérature sanskrite » UN SYSTÈME EXTRÊMEMENT COMPLEXE Problème, Panini pousse la concision à l'extrême. Il pose les règles sur la table, mais ne donne pas le mode d'emploi. Ce que l'on peut trouver dans les grammaires anciennes de latin ou de grec – les déclinaisons, les conjugaisons verbales – n'a pas d'équivalent dans son traité. Et depuis des siècles, c'est un casse-tête pour les locuteurs de sanskrit. « observe encore le philologue et traducteur Michel Angot. « ajoute-t-il, Tout le monde sort, Pierre reste » UNE NOUVELLE MÉTHODE PLUS PRÉCISE C'est là qu'intervient Rishi Rajpopat. Cet étudiant de Cambridge revendique d'avoir enfin cerné l'une de ces métarègles, mal comprise depuis très longtemps. Sa théorie se résume ainsi : en cas de conflit, lorsque l'une des formules de Panini peut s'appliquer aussi bien à droite ou à gauche d'un même mot, il faut choisir la règle qui s'applique au côté droit. Ça n'a l'air de rien, mais c'est sans doute une avancée majeure dans la compréhension du système de Panini. « assure Vincenzo Vergiani, le professeur de thèse de Rishi Rajpopat à Cambridge » Les critiques vous diront qu'il n'y a pas matière à se vanter. Et que, rapporté à la pensée complexe de Panini, c'est une goutte d'eau dans l'océan. Certes, mais l'équipe de Cambridge espère fédérer les bonnes volontés. « conclut Vincenzo Vergiani, »


Deux ans et demi après le coup d’État militaire en Birmanie, la population tout entière continue de se mobiliser contre la junte. Aux avant-postes de la lutte : la génération Z, ces jeunes ultra-connectés, en tête des manifestations et du mouvement de désobéissance civile. Ils agissent aujourd’hui dans l’ombre, pour retrouver leur liberté. Kristen est l’un des visages de cette jeunesse révolutionnaire. (Rediffusion du 5 février 2023) «» Kristen a 27 ans. Cette jeune ingénieure est issue de la Génération Z, ces moins de 30 ans, nés avec la révolution numérique, se sont investis corps et âme, il y a deux ans, pour reconquérir leur liberté. Kristen est devenue un maillon indispensable du mouvement révolutionnaire. Malgré la contestation muselée avec une incroyable brutalité, les jeunes continuent de s’engager dans la clandestinité. «, raconte Kristen. » Leur travail consiste à contrôler, répertorier, signaler tout mouvement et activité de l’armée birmane. Ces informations sont compilées puis distribuées aux guérillas ethniques et au ministère de la Défense du gouvernement d’unité nationale en exil. Ce rapport permet entre autres de réévaluer la stratégie révolutionnaire et de collecter les preuves des crimes de guerre commis par la junte. Kristen participe à une multitude d’autres groupes et organismes qui coordonnent les actions anti-junte dans une quarantaine de villes partout dans le pays. « » Que pense la militante du chef de la junte et du gouvernement Parallèle d’Unité Nationale (NUG), composés d’anciens élus renversés par la junte ? «, explique Kristen. » À lire aussiBirmanie: la prolongation de l'état d'urgence, tout sauf une surprise https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230201-birmanie-la-prolongation-de-l-état-d-urgence-tout-sauf-une-surprise Mais ce combat exige de nombreux sacrifices : « , déclare la militante. » Dans cette révolution, Kristen s’est fait de nouveaux amis, des camarades, des compagnons le lutte, car ses amis d’enfance et de l’université, en tout cas la plupart d’entre eux, ont choisi l’exil. Kristen, elle, a décidé de rester pour combattre ce régime tyrannique et autoritaire qui a brisé net tous ses rêves. « » À lire aussiBirmanie: la peine de l'ex-dirigeante Aung San Suu Kyi réduite à 27 ans après une grâce partielle https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230801-birmanie-l-ex-dirigeante-et-prix-nobel-de-la-paix-aung-san-suu-kyi-a-été-graciée


Le « greenwashing » a le vent en poupe. Les entreprises vantent leurs actions climatiques, mais leurs promesses sont souvent loin de la réalité. Parmi les 50 plus grands émetteurs de CO2 mondiaux, le cimentier suisse Holcim est ciblé par une plainte inédite en Indonésie. Quatre habitants de l’île Pulau Pari accusent le géant du béton de mettre leur vie en péril. Une affaire qui pourrait devenir un cas d’école, car Holcim, qui a cédé ses activités en Indonésie en 2019, est visé pour ses dégâts causés dans le monde entier. C’est un combat dans la veine de David contre Goliath. Une petite île défie le numéro un mondial du béton. Selon Edi, l’un des quatre plaignants, Holcim est responsable de la montée des eaux qui menace les 1 500 habitants de Pulau Pari : « » L’année dernière, Pari, qui vit de la pêche et du tourisme, a été inondée cinq fois. L’eau a déjà grignoté 11 % de la surface de l’île et détruit petit à petit les terres de Pak Arif : « . » « » À long terme, Pulau Pari risque de disparaître. Une conséquence directe des émissions de CO2 du cimentier Holcim, selon Yvan Maillard, le responsable « justice climatique » de l’ONG Entraide protestante suisse. Elle défend les plaignants, aux côtés de deux autres ONG. « . » Les plaignants réclament une indemnisation de 14 000 euros pour les dommages causés. Ils veulent aussi planter des mangroves et des murs protégeant les rivages. Une somme certes dérisoire pour une multinationale, mais une somme qui créerait un précédent… et ça, le cimentier suisse veut l’éviter. Sollicitée, l’entreprise nous a répondu : « . » HOLCIM, DEUXIÈME ENTREPRISE ATTAQUÉE EN JUSTICE PAR DES VICTIMES DU CHANGEMENT CLIMATIQUE Holcim dit vouloir devenir une entreprise à zéro émission nette de CO2 à l’horizon 2050. Trop tard, estiment les habitants de Pulau Pari. Il faut demander des comptes aux grands pollueurs dès à présent, estime aussi Yvan Maillard, une façon d’ouvrir la voie à d’autres victimes du dérèglement climatique : « » Holcim est seulement la deuxième entreprise dans le monde à être attaquée en justice par des victimes du changement climatique. L’autre est le géant allemand de l’énergie RWE, poursuivie par un paysan péruvien dont les terres risquent d’être englouties par le lac Palcacocha, gonflé par la fonte des glaces.


Direction Taïwan : Stellina Chen est une caricaturiste qui fait partie du collectif Cartooning for Peace. Cartooning for Peace permet de faire dialoguer les dessinateurs entre eux et de confronter leurs différentes nuances idéologiques. Son réseau donne une visibilité et un appui à ceux qui sont empêchés d’exercer librement leur métier ou dont la liberté est menacé. Avec sa plume, ou plutôt son coup de crayon, elle relate avec humour l’actualité mondiale. STELLINA CHEN : J’ai rejoint l’organisation Cartooning for Peace en 2018, et j’ai commencé à dessiner en 2017. Donc, au bout d’un an, j'ai postulé pour rejoindre l’organisation basée à Paris, créée par Plantu, le caricaturiste français. Ils nous aident à entrer en contact avec des médias français, mais leur but, c'est d’aider des caricaturistes dans le monde, dans des pays menacés par la dictature. Et maintenant, à cause de sa proximité avec la Chine, Taïwan est en haut de leur liste ! RFI : COMMENT PROCÉDEZ-VOUS POUR TROUVER VOTRE INSPIRATION ? Je regarde l’actualité et je cherche pendant une heure quelque chose qui va m’intéresser, jusqu’à ce que je trouve un angle, une idée ou une petite phrase sur lesquels je puisse travailler. Le procédé est compliqué à expliquer : par exemple, lorsque que Nancy Pelosi est venue à Taïwan, tout le monde se rappelle son tailleur rose et ses chaussures blanches à talons hauts assez emblématiques. Donc, je me suis demandée comment je pourrais utiliser ça comme symbole, ce costume, que tout le monde pourrait reconnaître immédiatement, et comment je pourrais le transformer. Puis, j’ai pensé à la forme de Taïwan, quand on regarde, ça ressemble à un talon. Et comme elle utilisait cette excuse de visite à Taïwan pour marcher sur une ligne rouge, pour voir jusqu’où cette ligne allait d’ailleurs pour la Chine, je me suis dit que j’allais transformer le talon en forme de Taïwan en train de s’appuyer sur les doigts de pied de Xi Jinping, c’était parfait. C’était un point de rupture que je pouvais exploiter. EN FAISANT CE GENRE DE DESSIN, TOUT EN ÉTANT TAÏWANAISE, N’ÊTES-VOUS PAS INQUIÈTE POUR VOTRE SÉCURITÉ ? Pour être honnête, en vivant à Taïwan, je ne me sens pas menacée, on est toujours en sécurité à Taïwan, il n’y a pas de censure, et nous sommes bien protégés par notre gouvernement. Nous avons notre liberté. Mais oui, je ne me sentirai pas autant en sécurité en voyageant en Chine, ou même à Hong Kong maintenant. Je m’inquiète de la sécurité de manière générale. Mais il y a bien sûr une sorte de cyber-armée en ligne, sur Instagram, sur Twitter, je reçois une multitude de commentaires me disant de retourner dans mon pays, et c’est souvent à propos de dessins sur la Chine. Je ne pense même pas que ce soit des humains derrière tout ça, juste des messages générés automatiquement ! Donc parfois, je ne regarde même pas, je laisse couler. POURQUOI PENSEZ-VOUS QU’IL EST IMPORTANT DE METTRE DE L’HUMOUR DANS DES CONTEXTES QUI SONT PARFOIS TRAGIQUES ? Le monde est plein d’actualités tragiques, constamment, et si l’on ne peut pas rire de certaines choses de temps en temps, ce serait vraiment triste. Par ailleurs, je pense que l’humour est une bonne façon pour les gens d’absorber de nouvelles informations, lorsque l’on rit de quelque chose, on l’intègre aussi, parfois sans s’en rendre compte. Par exemple, lorsque l’on lit un article, c’est au moins 1 000 mots, il faut se mettre dedans et peut-être qu’on laisse tomber en plein milieu, en se disant qu’on n’a pas le temps, ou bien que c’est trop de blabla… Mais un dessin, c’est très puissant. En cinq secondes, on perçoit l’humour, le sarcasme, ça s’imprime dans votre mémoire. Et cela vous prend cinq secondes pour dire « ». À lire aussiQuinze ans après les caricatures danoises, où en est le dessin de presse ? https://www.rfi.fr/fr/podcasts/20200930-quinze-ans-après-les-caricatures-danoises-où-en-est-le-dessin-presse


Il y aurait plus de 900 caméras chinoises installées dans tous les lieux de pouvoir australiens : ministères régaliens, au Parlement, dans les administrations... Des technologies qui font craindre un système d'espionnage à grande échelle. Car ces produits sont fabriqués par des entreprises liées au gouvernement de Pékin. L'Australie va-t-elle, à l'image des États-Unis, interdire purement et simplement le commerce de ces produits sur son territoire ? ()


Comment encourager ses parents à témoigner et raconter l’indicible, avant qu’il ne soit trop tard ? Comment recoller les morceaux des histoires familiales fragmentées des survivants, pour reconstituer la mémoire collective et la transmettre aux générations futures ? Sun Lay Tan, journaliste et militant associatif, lance un appel à témoins. Il est l’initiateur de FRAGMENTS KH50 http://www.fragmentis-vitae.org, un projet ambitieux à caractère scientifique, culturel et mémoriel, basé sur trois piliers : une plateforme web, un film documentaire et un monument érigé en hommage aux victimes des Khmers rouges.


Jakarta renouvelle à marche forcée son matériel de défense et n'hésite plus à mettre sur la table des milliards de dollars pour s'équiper de Rafale français, mais aussi, fidèle à sa politique de non-alignement, de F-15 américains ou d'équipement turc. Une véritable course à l'armement que notre journaliste décrypte avec Alban Sciascia directeur de la société de conseil stratégique Semar Sentinel. ► À LIRE AUSSI : L'INDONÉSIE ACHÈTE 12 MIRAGE 2000 D'OCCASION DANS L'ATTENTE DE LA LIVRAISON DE RAFALE https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230616-l-indonésie-achète-12-mirage-2000-d-occasion-dans-l-attente-de-la-livraison-de-rafale


Le 16 juin dernier, un rapport de Google révélait la plus large campagne de cyberespionnage depuis 2021 par un acteur malveillant lié à la Chine. Un groupe de cyberattaquants, visiblement lié à l'État chinois, qui visait notamment des agences gouvernementales de plusieurs pays représentant un intérêt stratégique pour Pékin. Que sait-on exactement du cyberespionnage chinois ? Paul Charon, directeur du domaine «» de l’Institut de recherche stratégique de l'école militaire à Paris (IRSEM), répond aux questions de Joris Zylberman. À lire aussiBallons, pirates et caméras: quand les États-Unis et leurs alliés accusent la Chine d’espionnage https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230211-ballons-pirates-et-caméras-quand-les-états-unis-et-leurs-alliés-accusent-la-chine-d-espionnage


La guerre en Ukraine a relégué au second plan d’autres crises comme le terrible sort de la minorité musulmane des Rohingyas. En août prochain, cette communauté apatride commémorera la sixième année de son exode massif de Birmanie. Près d’un million de Rohingyas vivent, depuis, dans une prison à ciel ouvert, des camps tentaculaires et insalubres au sud du Bangladesh. Mayyu Ali, originaire de l’État de Rakhine, rescapé des massacres de 2017 et victime de persécution dans les camps de réfugiés au Bangladesh, a pu finalement s’exiler au Canada. Ce poète, écrivain et militant nous livre son histoire qui est aussi celle de son peuple. Mayyu Ali a été le témoin des pires violences et injustices contre sa famille et sa communauté, une minorité musulmane parmi les plus opprimées au monde. Il est né en 1991 à Maungdaw dans l’État de Rakhine à l’ouest de la Birmanie. En août 2017, la junte militaire mène une politique de la terre brûlée qui forcera plus de 700 000 personnes à l’exil. « », raconte Mayyu Ali. « » Mayyu Ali décide de suivre ses parents qui ont finalement dû fuir de l’autre côté de la frontière, à Kutupalong, au Bangladesh. «», se souvient-il. « » L'ÉCRITURE, ENTRE EXUTOIRE ET ACTE DE RÉBELLION POUR MAYYU Il y restera 4 ans. Le camp est surchargé. Il y règne un climat de peur et d’insécurité. Viols, trafics, meurtres, enlèvements. Mayyu travaille avec des ONG, des journalistes, son activisme dérange. «. » ► À écouter aussi : Facebook, facteur de haine envers les Rohingyas https://www.rfi.fr/fr/podcasts/fréquence-asie/20221231-facebook-facteur-de-haine-envers-les-rohingyas L’écriture est pour Mayyu un exutoire, un acte de rébellion aussi. À l’heure où, faute de dons suffisants, les rations alimentaires des réfugiés ont été réduites et où la région a été récemment durement frappée par un cyclone, Mayyu continue de témoigner, sans relâche, pour aider sa communauté, pour qu’elle ne soit pas oubliée. « », affirme Mayyu Ali. « JE CONTINUERAI À ÉLEVER LA VOIX POUR MON PEUPLE » Puis il poursuit : « ». Mayyu Ali appelle la France et les autres pays européens à se joindre à la plainte de la Gambie contre la Birmanie, pour génocide contre les Rohingyas, devant la Cour Internationale de Justice. Pendant ce temps, sur le terrain, rien n’a changé. Les Rohingyas continuent de vivre dans la peur et l’insécurité, privés de droits, de liberté de mouvement et de citoyenneté. ► À lire aussi : Argentine: des Rohingyas témoignent dans une enquête sur les crimes présumés de l'armée birmane https://www.rfi.fr/fr/monde/20230609-argentine-des-rohingyas-témoignent-dans-une-enquête-sur-les-crimes-présumés-de-l-armée-birmane


Il y a cinq ans, le 12 juin 2018, Kim Jong-un acceptait de rencontrer Donald Trump. Et, l'espace de quelques mois, la communauté internationale s'est autorisée à penser que la Corée du Nord allait enfin sortir de son isolement, renoncer à l'arme nucléaire et revenir dans le concert des nations. Cinq plus tard, la réalité a repris le dessus. L'Occident ne sait pas parler avec Pyongyang et le régime nord-coréen ne renoncera jamais à son programme nucléaire. Au soir du 12 juin 2018, Donald Trump se présente devant les journalistes du monde entier réunis à Singapour. Il vient de s'entretenir en tête-à-tête avec Kim Jong-un, et pour lui, c’est une certitude, tous les voyants sont au vert : «» C'est vrai, symboliquement, cette rencontre marque un premier pas. Mais en réalité, cet accord ne prévoit aucun calendrier précis, il ne dit pas non plus quels seraient les mécanismes de vérification, et surtout, la Maison-Blanche commet une magistrale erreur d'interprétation, car, à Pyongyang, la dénucléarisation de la péninsule coréenne n'a pas du tout le même sens qu'à Washington. «, rappelle la spécialiste Raphaëlle Pierre. » Kim Jong Un fait tout de même un premier geste, il annonce la FERMETURE DU SITE D'ESSAIS NUCLÉAIRES DE PUNGGYE-RI https://www.bbc.com/news/world-asia-44240047, dans le nord-est du pays, mais pas question d'aller plus loin. C'est donnant-donnant, martèle les Nord-Coréens : si les États-Unis veulent que ce dossier avance, il faut qu'ils lèvent, au moins partiellement, leurs sanctions économiques. C’est le sens de l’allocution rarissime prononcée par Ri YONG HO, LE PATRON DE LA DIPLOMATIE NORD-CORÉENNE https://america.cgtn.com/2019/02/28/dprk-fm-ri-yong-ho-disputes-trump-reason-for-summit-collapse, qui acte l’échec du sommet de Hanoï, au Vietnam, le 28 février 2019 «dit-il » En d'autres termes, la Corée du Nord a le sentiment de faire son maximum, et il apparaît très vite qu'elle ne comprend plus le logiciel américain, car Washington se montre incapable, souligne Raphaëlle Pierre, de proposer un contre-scénario crédible : Un an et demi après la poignée de main de Singapour, la rupture est consommée. Le 1er janvier 2020, Kim Jong-un annonce la fin du moratoire sur les essais de missiles balistiques et la remontée en puissance du programme nord-coréen. Il n'y aura plus de retour en arrière, car l'an dernier (), LA CORÉE DU NORD A RÉINSCRIT DANS SA LOI https://edition.cnn.com/2022/09/09/asia/north-korea-kim-nuclear-weapons-state-law-intl-hnk/index.html ce que tout le monde avait compris : nous sommes un État nucléaire, c'est irréversible, il va falloir faire avec.


Chaque année depuis 1989, le 4 juin est une date ultrasensible en Chine. Il est toujours interdit d’évoquer le massacre qui a eu lieu cette nuit-là sur la place Tiananmen à Pékin et qui a mis fin à un important mouvement étudiant pour la démocratie. En France, de jeunes Chinois se mobilisent : ils commémorent les victimes et disent aussi « stop » au régime toujours plus répressif du président Xi Jinping. Rencontre de deux jeunes Chinois qui organisent ce dimanche une manifestation à Paris. Du « printemps de Pékin », ces quelques mois pendant lesquels des millions d’étudiants en Chine osaient rêver de démocratie. Luxi, qui à l’époque n’avait qu’une dizaine d’années, a gardé ce souvenir : « » Mais tout bascule dans la nuit du 3 au 4 juin : l’armée ouvre le feu sur les occupants de la place Tiananmen. Des chars écrasent le mouvement pro-démocratie dans le sang. « raconte Luxi » LA PEUR AU VENTRE La dessinatrice, qui vient de publier la bande dessinée , vit en France. Ici, elle peut enfin briser le tabou et rendre hommage aux victimes du massacre. Même si elle l’avoue : c’est avec la peur au ventre. « » ► À ÉCOUTER AUSSI : MASSACRE DE TIANANMEN DU 4 JUIN 1989: LA MÉMOIRE VERROUILLÉE DES PÉKINOIS https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20220604-massacre-de-tiananmen-du-4-juin-1989-la-mémoire-verrouillée-des-pékinois Luxi cachera son visage derrière un masque pour ne pas être repérée par des agents chinois. Elle manifestera contre le régime toujours plus répressif de Xi Jinping. Chiang, étudiant à Paris, sera, lui aussi, dans la rue : « » « ON EST LÀ POUR LE PRINCIPE, PAS POUR LE RÉSULTAT » Pendant longtemps, les défenseurs des droits de l’homme et les vétérans du mouvement pro-démocratie étaient bien seuls à commémorer le massacre de Tiananmen. Mais l’interdiction de la traditionnelle veillée aux bougies à Hong Kong en 2020 a changé la donne. Puis, en novembre dernier, il y a eu en Chine les manifestations contre la politique « zéro Covid » et ses restrictions à outrance qui ont donné un coup d’accélérateur à la mobilisation des Chinois de l’étranger : «serappelle Chiang » Les étudiants de Tiananmen ’89 – un exemple à suivre ? Chiang et Luxi l’affirment. La dessinatrice voit dans cette manifestation un devoir moral nécessaire, mais n'est pas dupe quant à son impact réel : « » Ce dimanche, ils rendront hommage aux victimes du 4 juin 1989 devant la fontaine Saint-Michel à Paris, avant de participer à une cérémonie organisée par l’association Solidarité Chine. ► À LIRE AUSSI : HONG KONG: LES TROIS ORGANISATEURS D'UNE VEILLÉE POUR TIANANMEN RECONNUS COUPABLES D'«OBSTRUCTION» https://www.rfi.fr/fr/asie-pacifique/20230304-hong-kong-les-trois-organisateurs-d-une-veillée-pour-tiananmen-reconnus-coupables-d-obstruction


Des négociations internationales pour lutter contre la pollution plastique reprennent ce lundi 29 mai à Paris sous l'égide des Nations unies. 175 pays se sont engagés à parvenir à un traité international juridiquement contraignant d'ici 2024. Les enjeux sont énormes pour l'Asie. Les plastiques connaissent une croissance exponentielle depuis les années 1950 et devraient tripler d'ici 2060. Entretien avec Tim Grabiel, avocat au sein de l’Agence d’investigation environnementale (EIA). RFI : Pourquoi les négociations qui s'ouvrent ce lundi sont-elles primordiales ? Tim Grabiel : Les plastiques contiennent plus de 13 000 produits chimiques. Certains sont connus pour être toxiques et dangereux, et sont réglementés au niveau national. Mais il n'y a pas d'approche globale. L’impact sur la biodiversité est énorme. Ce qui est préoccupant, c’est que l’on ne sait pas exactement ce que cela implique si nous n'agissons pas rapidement. Nous n’avons pas de chiffre lié au plastique qui nous permette de savoir à quel point notre planète sera différente de celle dont nous avons hérité. Mais il y a des indications selon lesquelles nous avons atteint les limites de notre Terre. Jusqu’à quand pourra-t-elle encaisser cette quantité de pollution ? Si rien ne change, l’état de la planète ne fera qu'empirer. En ce qui concerne les pays de l'Asie du Sud-Est, quelle est la gravité de la situation ? Ce sont eux qui reçoivent une grande partie de la pollution plastique sur leurs côtes, sans qu'ils en soient responsables. Ils considèrent donc qu'il s'agit d'une question essentielle qui doit être abordée non seulement par des mesures telles que la gestion des déchets, mais aussi par des mesures plus en amont, telles que la production et la consommation de plastiques en général. Nous aimerions voir une approche globale, afin de réduire réellement notre production de plastique et, pour le plastique que nous utilisons, de l'utiliser à bon escient et de manière à promouvoir l'économie circulaire. Ce qui réduira le fardeau dont ces pays asiatiques souffrent. Et cela contribuera à nettoyer leurs plages. Cela contribuera à soutenir le tourisme et la gestion des pêcheries locales, sans oublier l'aspect climatique. Les plastiques sont fabriqués à 99% à partir de combustibles fossiles. En agissant de la sorte, nous nous alignerons sur nos objectifs en matière de climat. Il y a deux camps, deux façons de penser différentes lors de ces négociations pour aboutir à un traité international sur la pollution plastique. Quel sera le principal enjeu lors des discussions pour ces pays asiatiques ? D'une part, nous devons réduire la complexité du problème, ce qui signifie que nous devons éliminer les produits chimiques préoccupants, ceux qui sont toxiques et dangereux et pour lesquels il existe des substituts. Nous aurons un sous-ensemble plus petit de produits chimiques utilisés que nous pourrons gérer plus facilement. En ce qui concerne les plastiques que nous utilisons déjà, ils sont produits en des volumes tellement importants qu’il n'y a aucune chance que nous puissions nous sortir de ce problème aisément. Donc tout en réduisant la complexité du problème, nous devons en réduire la taille, et c'est ce que l'on appelle communément les limites de la production et de la consommation. Et je pense que le grand défi réside dans le fait que certains pays ne veulent en aucun cas limiter leur production de plastique. Et l'idée que nous puissions avoir des limites convenues au niveau international est une chose contre laquelle ils font pression. Mais c'est probablement là que réside la mesure la plus importante que nous puissions prendre. En effet, elle a de telles implications pour tout ce qui se passe en aval, que ce soit la conception des produits, notre utilisation excessive du plastique, ou bien notre capacité à gérer ce que nous utilisons. Si nous n'imposons aucune limite, nous ne pourrons jamais parvenir à une économie circulaire pour les plastiques. Avec un tel volume de plastique mis sur le marché chaque année, il est tout simplement impossible de disposer de l'infrastructure nécessaire pour le collecter et le traiter séparément. ► À lire aussi : Pollution plastique: la Californie ouvre une enquête sur le rôle de l'industrie pétrochimique


Comment encourager ses parents à témoigner et raconter l’indicible, avant qu’il ne soit trop tard ? Comment recoller les morceaux des histoires familiales fragmentées des survivants, pour reconstituer la mémoire collective et la transmettre aux générations futures ? Sun Lay Tan, journaliste et militant associatif, lance un appel à témoins. Il est l’initiateur de Fragments KH50, un projet ambitieux à caractère scientifique, culturel et mémoriel, basé sur trois piliers : une plateforme web, un film documentaire et un monument érigé en hommage aux victimes des Khmers rouges.


Il y a dix jours, l'Ouzbékistan a dit oui à sa nouvelle Constitution. Un texte écrit sur mesure par et pour le président ouzbek, Chavkat Mirzioïev, qui va lui permettre de se maintenir au pouvoir le plus longtemps possible. Où est passé celui que l'on présentait à ses débuts comme un réformateur acharné, qui voulait à tout prix transformer son pays ?


Dans la région autonome du Xinjiang, la Chine a poussé la surveillance de masse à l'extrême. Déjà depuis 2017, Human Rights Watch documente les crimes contre l’humanité commis dans cette région. Dans une nouvelle étude, l’ONG illustre comment - grâce à des technologies sophistiquées - la police bafoue les droits des Ouïghours et d'autres minorités turciques et musulmanes, au nom de la lutte antiterroriste. Maya Wang, chercheuse spécialiste de la Chine à HRW, décrypte les méthodes employées par les autorités. RFI: Votre nouveau rapport apporte-t-il la preuve qu’au Xinjiang, il suffit d’écouter des sourates du Coran sur son téléphone pour être arrêté ? C’est ça. Nous avons analysé scientifiquement une base de données dont la police se sert. Cette nouvelle investigation démontre que les autorités considèrent l’enregistrement de prêches et de récitations du Coran comme étant dangereux et extrémiste. Nous l’avons identifié dans l’une de leurs bases de données officielles, et nous comprenons désormais comment la surveillance fonctionne. Que contient cette base de données à laquelle vous avez pu avoir accès ? Nous avons examiné une liste de 50 000 fichiers qualifiés de violents ou d’extrémistes par la police. 9% de ces fichiers incluent en effet des contenus violents, comme par exemple des égorgements. 4% contiennent des appels à la violence. Mais cela reste une toute petite proportion. Plus de la moitié, 57%, ne sont que de simples textes religieux y compris des récitations du Coran, qui n’ont rien d’extrémiste ou de violent. Aux yeux de la police chinoise, les termes « violent » ou « extrémiste » signifient quoi exactement ? C’est précisément ça, le problème en Chine et particulièrement au Xinjiang. Le gouvernement chinois dit lutter contre le terrorisme et l’extrémisme. Mais ces termes sont vastes. Déjà, si vous critiquez le gouvernement, on peut vous accuser d’être un extrémiste. Les lois antiterroristes sont formulées de manière extrêmement vague en Chine. Mais au Xinjiang, les autorités vont même au-delà de ces lois et agissent souvent de manière illégale. Sous la bannière de la lutte antiterroriste, quasiment tout est considéré comme du terrorisme. Peut-on dire que le smartphone facilite un espionnage totalitaire des citoyens ? C’est ce que notre étude démontre. Le smartphone est devenu le meilleur moyen de surveiller la population. Ce qui est choquant dans notre enquête, ce sont aussi l’ampleur et la rapidité avec lesquelles les policiers savent analyser tout le contenu des téléphones. À Urumqi, la capitale (3,5 millions d’habitants), ils ont examiné 1,2 million de téléphones pas moins de 11 millions de fois en seulement neuf mois. Imaginez combien d’agent serait nécessaire pour le faire manuellement ! Mais les nouveaux systèmes de surveillance de masse automatisés permettent de vérifier de façon très rapide le contenu de votre portable. On peut réprimer une société avec des moyens techniques simples et sophistiqués. À chaque fois, l’État pousse plus loin. À chaque étape, on éradique davantage la liberté d’une façon très intrusive. Human Rights Watch réclame une enquête internationale et indépendante au Xinjiang, mais comment convaincre la Chine de l’accepter ? En octobre dernier, le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU a voulu voter une résolution pour discuter de la situation au Xinjiang. Mais cela a échoué, car trop d’États étaient contre. Mais nous espérons que lors des prochaines sessions, à partir de juin, des gouvernements comme celui de la France, se mettent à la tête du mouvement pour demander une résolution, pour discuter et pour établir un mécanisme qui permettra de scruter les abus des droits de l’Homme commis par la Chine, surtout au Xinjiang. C’est faisable, la question est juste s’il y a la volonté pour le faire au sein du Conseil des droits de l’Homme. ► À lire aussi : Chine: le journaliste citoyen Fang Bin libéré après trois ans de détention


La température de l’air a augmenté de plus d’un degré depuis le début du XXe siècle ce qui provoque une fonte des glaciers dont les conséquences pourraient être dantesques d’ici la fin du siècle. Entretien avec Patrick Wagnon, glaciologue à l'Institut des géosciences de l'environnement de Grenoble. Les deux tiers des glaciers de l'Himalaya et de l'Hindou Kouch pourraient fondre d'ici 2100 si la planète restait sur la même trajectoire d'émissions de gaz à effet de serre, avec des conséquences dramatiques pour les millions d’habitants qui dépendent des ressources en eau jusqu’ici fiables. Près de 60 millions de personnes vivant autour de l'Himalaya souffriront de pénuries alimentaires dans les décennies à venir, alors que les glaciers rétrécissent et que les sources d'eau dont ils dépendent pour arroser leurs cultures se tarissent. ► À lire aussi : À la Une: l'Asie suffoque sous une «chaleur extrême» alimentée par le réchauffement climatique


Le 24 avril 2013, un immeuble situé dans les faubourgs ouest de Dacca, s’effondre. Le bâtiment de huit étages abritait six usines textiles. Le bilan est effroyable : 1 138 ouvriers sont morts et plus de 2 000 blessés. Jusqu’à aujourd’hui, l'accident du Rana Plaza est l’accident le plus grave jamais répertorié dans l’industrie de l’habillement. La tragédie, qui était le résultat d’une succession de négligences, a mis en lumière la corruption des fonctionnaires locaux, le non-respect des normes élémentaires de sécurité et de nombreuses autres défaillances. Pour éviter de telles catastrophes, quels progrès ont été réalisés depuis ? Entretien avec Nayla Ajaltouni, déléguée générale du collectif « Éthique sur l’étiquette ».


En Thaïlande, l’opposition caracole en tête des sondages pour les législatives prévues le 14 mai prochain. Mais depuis le putsch militaire en 2014, l’armée a changé les règles du jeu politique en sa faveur. Ce scrutin doit déterminer si la deuxième économie de l’Asie du Sud-Est arrive enfin à sortir de l’ornière qui paralyse le pays. La campagne électorale bat son plein dans les rues de Bangkok, et comme à chaque fois depuis plus de 20 ans, deux mastodontes politiques s’affrontent. D’un côté, on trouve le tout-puissant clan militaro-royaliste, de l’autre celui du principal parti d’opposition Pheu Thai de l’ex-Premier ministre et milliardaire en exil Thaksin Shinawatra. La question cruciale qui se pose aux 52 millions d’électeurs : « Est-ce qu’on va enfin sortir de ce face à face entre l’armée et le clan Shinawatra ? », pose ainsi Sophie Boisseau-Durocher, chercheuse au Centre Asie de l’IFRI. « De façon habile, Thaksin a nommé sa fille. Ce face à face qui ne permet pas aux partis alternatifs, aux jeunes comme Move Forward de vraiment prendre leur place sur l’échiquier politique nationale. » Le parti Move Forward espère faire carton plein chez les jeunes pro-démocratie qui sont descendus en masse dans la rue en été 2020. Mais réussira-t-il à renverser la table pour établir, aux côtés du parti Pheu Thai, un gouvernement plus démocratique ? Sunai Phusak, représentant à Bangkok de l’ONG Human Rights Watch, craint que beaucoup de jeunes bouderont les urnes : « Les jeunes électeurs sont frustrés, ils sont très malheureux avec la politique thaïlandaise si peu démocratique. Ils veulent des changements, une transition vers une véritable démocratie. Le défi pour les partis pro-démocratie est donc de les convaincre qu'une façon d'y arriver est de participer aux élections. Il faut les convaincre que malgré les défauts, malgré un système électoral biaisé, il peut y avoir des changements, à condition qu’ils aillent voter en masse. » Une Constitution favorable au général Prayut Au pouvoir depuis un putsch militaire en 2014 et légitimé en 2019 par des législatives controversées, l’actuel Premier ministre, l’impopulaire général Prayut, peut compter sur une constitution façonnée à sa guise : « L’armée a mis en place tout un mécanisme qui lui permet de garder le contrôle et notamment cette fameuse Constitution de 2017 impose que le Premier ministre soit nommé à la fois par les députés et les 250 sénateurs qui sont eux nommés par le pouvoir », rappelle Sophie Boisseau-Durocher. « La question est de savoir : est-ce que ces sénateurs pourraient aller à l’encontre des intérêts de l’armée ? » C’est peu probable. En 2019, aucun sénateur n’a voté contre les militaires. Cette fois encore, seul un raz de marée permettrait à l’opposition de nommer le Premier ministre. « Il lui faudra gagner plus de 376 sièges sur les 500 pour contourner le vote des sénateurs. C’est un énorme défi. C’est un système électoral pourri jusqu’à l’os qui permet au général Prayut de continuer à gouverner le pays, peu importe son résultat aux élections. » Aux électeurs, il ne restera peut-être que la rue pour exprimer leur mécontentement, prédit Sophie Boisseau-Durocher : « La voix populaire n’est jamais entendue. Aujourd’hui, le sentiment général est que, s’il y a trop d’abus, de manipulations excessives, est-ce que la population va descendre à nouveau dans la rue ? C’est une question ouverte ! La voix populaire n’est jamais entendue. »


La culture du riz, principal aliment de base en Asie, est responsable d'environ 10% des émissions mondiales de méthane, un gaz qui, en deux décennies, retient environ 80 fois plus de chaleur que le dioxyde de carbone. Normalement associé aux vaches, le méthane est également généré par des bactéries qui se développent dans les rizières inondées et qui prospèrent si les résidus de paille restent pourrir dans les champs après la récolte. ► À écouter aussi : Élevage: comment réduire le méthane entérique des vaches Le marché carbone scruté depuis l’espace


D'un côté, la Chine, deuxième puissance mondiale. De l'autre, Taïwan, qui ne veut pas devenir une région chinoise. Et qui, pour exister sur la scène mondiale, a besoin d’alliés. En tournée en Amérique centrale, la présidente Tsai Ing-wen va plus que jamais devoir rassurer et cajoler deux petits pays, le Bélize et le Guatemala, qui sont les derniers États de la région à reconnaître officiellement l'existence de son pays. Il se murmure qu’un gros chèque serait passé par là… Dix milliards de dollars. Voilà le prix du Honduras qui a retourné sa veste quelques semaines avant le voyage de Tsai Ing-wen en Amérique centrale. Nouer des relations diplomatiques avec la Chine et couper ses liens avec Taïwan, au jeu de la diplomatie du chéquier, les autorités chinoises sont imbattables. Et leur stratégie fonctionne ! Petit à petit – Costa Rica en 2017, Salvador en 2018, Nicaragua en 2021, Honduras en 2023 –, les alliés de Taïwan quittent le navire. Et, face au rouleau compresseur chinois, on en vient même à se demander ce qui les retient. Quel discours Tsai Ing-wen va-t-elle bien pouvoir tenir aux dirigeants du Bélize et du Guatemala pour les convaincre de rester dans le giron taïwanais ? « En gardant un lien diplomatique avec Taïwan, ils assurent aussi un lien très fort avec les États-Unis, observe Jean-Yves Heurtebise, maître de conférences à l’Université catholique de Fulan, à Taïwan. Quand un pays comme le Honduras fait volte-face ou reconnaît la République populaire de Chine, il peut s'attendre à recevoir moins de soutien par ailleurs des États-Unis et, malgré tout, il y a aussi pour eux une forme de vitrine diplomatique et démocratique. En restant du côté de Taïwan, on manifeste son soutien à la démocratie, on manifeste son soutien à un régime politique ouvert. Pour un dirigeant de l'opposition, quand le gouvernement se place du côté de la Chine, il sait que sa représentativité démocratique va être menacée. Le lien entre un pays qui reconnait officiellement Taïwan et, à l'intérieur du pays, le degré de démocratie, et donc le degré de possibilité pour l'opposition de continuer à exister, c'est quelque chose qui est presque prouvé empiriquement. » ► À lire aussi : Chine: pourquoi le Honduras n'a-t-il d'autre choix que de rompre avec Taïwan ? Il y a cinquante ans, 71 pays reconnaissaient l’existence souveraine de Taïwan ; ils ne sont plus que 13 aujourd’hui. Mais le diable se niche dans les détails. Penchez-vous sur l’activité diplomatique taïwanaise, et vous constaterez que presque chaque semaine, une délégation étrangère est reçue à Taipei. Il y a quelques jours, ce sont 150 personnalités tchèques qui ont fait le déplacement. Et c’est symptomatique, souligne Jean-Yves Heurtebise. Depuis trois ou quatre ans, à mesure que certains États lui tournent le dos au profit de la Chine, Taïwan n’a jamais reçu autant de déclarations d’amour informelles. Et ces cartes postales sont très souvent venues de pays d’Europe de l’Est. « Une des choses principales, c'est que la Chine est arrivée vers ces pays de l'Est avec toute une série de projets, de financements, qui en réalité n'ont jamais vraiment vu le jour. En plus, évidemment, entre-temps, il y a eu la nouvelle glaciation des relations entre la Chine et les États-Unis et, cerise sur le gâteau, le rapprochement entre la Chine et la Russie, rappelleJean-Yves Heurtebise. Et on ne peut pas dire que les pays d'Europe de l'Est soient très amis avec la Russie. Donc, à partir du moment où on a une amitié sans limites entre ces Xi Jinping et Vladimir Poutine et que je suis la Pologne ou la Lituanie, forcément je ne vais pas regarder la Chine de la même manière. Xi Jinping rend visite à quelqu'un qui est déclaré maintenant comme potentiellement un criminel de guerre. Au départ, on avait l'idée que la Chine allait permettre la paix entre l'Ukraine et la Russie, plus personne n'en parle maintenant. On pensait, quand il était en Russie, il ferait un coup de fil au président ukrainien, ça ne s’est pas passé non plus. » ► À écouter aussi : Taïwan, Pékin et Washington, le trio infernal ? Pour l’instant, pas de quoi s’affoler, mais Tsai Ing-wen n’est pas éternelle. En vertu de la Constitution taïwanaise, elle ne pourra pas se représenter à l’élection présidentielle de janvier 2024 et son parti est en perte de vitesse. Qui sait si son successeur cherchera lui aussi l’appui de la communauté internationale face aux assauts de Pékin ?